Le square de la rue VilleneuveMoi je vais cueillir une fleurette champêtre
Pour décrire ce parc avec sa tige fine:
Il y a un joli square à Clichy. Par la fenêtre
On voit comment des marionnettes malignes
Sur les pistes sablées s’amusent et jouent. –
La réalité s’y enlace avec le mystère:
Des statues pensives s’y donnent des rendez-vous
Et de nouveau se figent, à la lumiere.
Il y a un petit étang où les canards plongent.
Et le soir, quand monte au ciel une lune pâle,
Pour prendre un bain, une nymphe s’y allonge,
Et les ailes des pigeons lui servent de voile.
Sur l’arbuste, des roses rouges ne cessent de naître,
Telles des flammes écarlates entourées d’épines…
Moi je vais cueillir une fleurette champêtre,
Pour dépeindre ce parc avec sa tige fine.
Paris
Ville dansante, légère et frêle,
Éclatante, belle comme le jour,
Pleine de parcs et de chapelles,
De fontaines, de musées, de tours, -
Pour cette ville, mon cœur est de cire:
Épris d'amour ardent, il fond...
On oublie parfois de dire
Que Paris c’est une ville des ponts:
L'un est décoré de chevaux d'or,
L'autre, d'Henri Quatre tout vert.
Ce roi garde, galant encore,
La maison où naquit Molière… -
C'est bien là que nos rêves reviennent,
Où le son de la viole retentit,
Où la Muse, la petite comédienne,
Nous incite à la poésie...
* * *
L’orgue emportait nos âmes en flux,
Se lamentait, - l’on écoutait
Le chœur des religieuses chanter
«Le Seigneur est lumière et salut»...
La butte ornée par la coupole,
Couverte de narcisses délicieux, -
O mon Sacré-Cœur blanc, tes yeux
Sont des colombes qui s’envolent!..
Je n’oublierai jamais ces lieux. –
Ma chère petite sœur Christine-Marie,
Que votre ange tutélaire prie
Avec le mien, en cieux...
Le Petit Prince
Inattendu, du ciel doucement il tombe
Et dans un an, du même désert s’envole;
Et deux étoiles, comme deux colombes,
Reposent sur ses épaules.
Si vous le voyez, n’est-ce pas vous m’écrirez?-
Il me manque tant, et je suis las d’attendre!
Des cheveux soyeux, dorés, couleur de blé
Et un cœur pur et infiniment tendre…
Pour son bonheur, il dit qu’il suffira
Un petit dessin du peintre malhabile;
Son épée à la main, il défendra
La rose qu’il aime, une fleur fière et fragile...
Vous pourriez dire, bien sûr, que je délire,
Mais son étoile natale luit comme un cierge;
Le ciel nocturne rit, tinte et respire…
Seuls les enfants savent ce qu’ils cherchent.
Thèmes et versions
A. Fete
Une sérénade
La soirée s’éteint, toute douce,
Aux montagnes qu’elle dore;
L’air torride des soupirs pousse…
Dors, petite que j’adore.
Les rossignols chantent en quintes,
La nuit vient d’éclore
Et les cordes timides tintent,-
Dors, petite que j’adore.
Les yeux fixés séraphiques
Qui scintillent sans clore
Au souffle de la nuit pacifique, -
Dors, petite que j’adore.
Sergueï Yessénine
* * *
La rivière et la pelouse
Veillent pendant cette nuit obscure,
L’éclair mousseux ôte ses douze
Ceintures coulantes qui fulgurent.
Le bouleau du tertre pleure
À suif que la lune argente…
“Quand sortiras-tu, mon cœur?”
Le joueur de gusli chante.
Belle enfant, t’es si bien faite,
Je n’en détache pas mes yeux.
L’on danse à perdre la tête, -
Et j’arrache ton voile crayeux…
Je t’emmenerai sous les pentes
Au bois vert, au manoir sombre.
Les herbes douces feront ta mante -
Jusqu’a ce que l’aube rose rompt l’ombre.
Nikolaï Minski
Le calme
La mer est en quiétude. Au loin et tout près d’elle,
Toute discorde oubliée devant l’obscurite,
L’onde aérienne et le désert des eaux dorées
Songent dans l’étreinte sans bornes, et leur rêve bleu les mêle.
Leur réconciliation est douce telle une amie,-
Pour que la côte se laisse vaincre par la paix céleste
Et les roches se figent au-dessus du fond, modestes
Comme l’écho des paroles tristes et qui chantent l’oubli…
Cette flamme dans le lointain est une étoile brillante ;
Mais, separee de nous par l’océan de l’air,
Elle n’est qu’une lueur timide pour cette dormeuse la terre,
Peut-être entourée d’une tempête incessante:
Un signe du déclin – ou le scintillement rose,
Un silence lumineux dans l’obscurité close.
D.Tchougounov
* * *
Suivre les dernières alleés de l’an
Et, en regardant par l’automne, sourire,
Et remuer les feuilles mortes en rêvant,
Croire en couleurs, bonheur et étoiles, tant
Ne se tromper plus jamais du délire.
Ne languir qu’un peu, aux rêves rayonnants,
Date: 2016-01-05; view: 791
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