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Acte II Scène XVI Pierrette, Gaby, Suzon, Catherine, Mamy, Louise, Mme Chanel

Madame CHANEL, intervient. — Parfaitement, une erreur ! Je suis obligée de témoigner pour Louise

C'est moi qui vais retirer le courrier de la boite, depuis dix ans... Louise ne l'approchait jamais. Louise ne pouvait rien dérober. C'est ma faute si, un jour, j'ai donné une lettre de Madame à Louise. En voiîà une affaire ! On peut se tromper !

MAMY. — J'avais un mandat dans cette lettre.

Madame CHANEL. — Et après? On peut se tromper, on peut donner une enveloppe pour une autre! Tout le monde peut faire une erreur... J'en fais souvent des erreurs. Tenez! J'ai surpris un jour Madame votre grand-mère en train de boire au goulot d'une bouteille de porto. Eh bien ! c'était une erreur! Elle me l'a bien expliqué : elle regardait dedans pour voir si la bouteille était vide!... Et je ne suis pas allée raconter partout que vous étiez une poivrote!

LOUISE. — Merci, Chanel.

MAMY, contre-attaque. — Madame Chanel, puisque vous êtes si honnête, vous allez nous expliquer pourquoi — alors que vous avez dit être partie de la maison vers minuit — pourquoi j'ai vu votre manteau et votre fichu accrochés dans le vestibule de l'office et cela vers une heure et demie, quand je suis descendue chercher ma laine au salon... Vous avez la répartie si facile ! Répondez ! (Un silence. Mamy triomphe.) Répondez donc !

Madame CHANEL, après un temps. — Oui, je suis revenue dans la maison vers une heure du matin !

SUZON. — Pourquoi ne l'avais-tu pas dit?

Madame CHANEL. — Je ne pensais pas que les choses en arriveraient là ! Je croyais qu'on allait arrêter le coupable tout de suite.

SUZON. — Pourquoi as-tu éprouvé le besoin de revenir ici après minuit?

Madame CHANEL. — En quittant la maison, je suis allée droit à mon pavillon où j’avais laissé Pierrette. Elle était là depuis 9 heures du soir. Nous comptions faire une partie de cartes... Quand je n’ai trouvé personne chez moi, j’avoue que j’ai eu peur...

SUZON. — Peur?

MADAME CHANEL. — Non, ce n’est pas le mot... Je veux dire que j’ai pensé qu’on s’était croisées..., que Pierrette avait dû venir voir Monsieur ! Je craignais leurs rencontres, leurs différends, leurs disputes !

PIERRETTE, qui bondit dans la pièce comme un démon. — Aaah ! Madame Chanel, bravo! Vous faites du bon travail ! Dites plutôt que vous êtes revenue par besoin ! Par besoin de jouer ! Ça vous tient, la passion de poker... hein ?

MADAME CHANEL. — Si vous voulez insinuer...

SUZON, qui les sépare et prend Chanel par le bras. — Chanel, tu est donc montée chez papa vers une heure ?

MADAME CHANEL. — Oui.

SUZON. — Et tu y as retrouvé Pierrette ?

MADAME CHANEL. — Oui.

SUZON. — Que disaient-ils ?

MADAME CHANEL — Rien.

SUZON. — Comment rien ? Ils ne disaient rien ? Que faisaient-ils ?



MADAME CHANEL. — Ben !... Ils jouaient aux cartes !

GABY, bondit, sidérée. — Qu'est-ce que vous dites ? Mon mari jouait aux cartes aussi ?

MADAME CHANEL. — Oui, madame...

GABY. — Depuis quand ?

MADAME CHANEL, qui désigne Pierrette. — Depuis...

PIERRETTE. — Depuis mon arrivée ici, sans doute ?

MADAME CHANEL. — Oui.

PIERRETTE. — C'est faux ! Marcel courait les tripots à tous ses voyages à Paris. Je vous en parle en connaissance de cause. C'est moi qui le pilotais... Alors qu'on ne vienne pas me coller ses défauts sur mon compte. Et vous, c'est sans doute depuis mon arrivée aussi que vous avez cette passion des cartes, du jeu, du P.M.U., etc. Vous et Marcel étiez deux innocents, sans doute, à qui j'ai passé la peste ?

MADAME CHANEL. — Oh ! non ! Moi, je joue depuis toujours Seulement, depuis votre arrivée, je perds plus souvent... C'est tout.

PIERRETTE. — Vous avez englouti toutes vos économies et, à présent, vous allez dire que je triche et vous vole ?

MADAME CHANEL. — Je ne dis rien. Parce que...

PIERRETTE. — ...Parce que quoi ?

MADAME CHANEL. — Parce que je n'ai pas de preuves !

PIERRETTE. — Quand on n'a pas de preuves, on se tait !

(Elle s'éloigne, moqueuse.)

MADAME CHANEL, aux autres. — Mettez-vous à ma place : j'avais deux as de cœur ! ! !

(Elle comprend qu'elle s'enlise et pleure dans ses mains.)

SUZON. — Ma Chanel ! Toi !

MADAME CHANEL — Suzon... Je te jure que je suis incapable d'avoir fait quelque chose de mal ! Ne crois pas ça de moi, ma petite fille...

MAMY. — Mais alors, Marcel, Pierrette et Madame Chanel, ils jouaient tous les trois ?

CATHERINE. — Tu regrettes de n'avoir pas fait la quatrième pour jouer tes titres ?

(Elle évite un coup de canne.)

GABY. — Madame Chanel ! Vous qui aviez toute ma confiance ! Vous à qui j'ai laissé l'honneur d'élever mes filles...

MADAME CHANEL — Fallait bien que j'ai l'honneur de les élever, Madame ! Si elles n'avaient eu que vos attentions, elles n'auraient pas eu grand-chose !

GABY. — Oh ! c'est la première et la dernière fois que j'entends de pareils propos. Quand la police arrivera, je ne vous épargnerai pas, madame Chanel.

MADAME CHANEL — Comme vous voudrez, Madame. Je n'ai rien à cacher, moi!

SUZON, qui reprend Madame Chanel par le bras. — Chanel as-tu joué longtemps au poker, hier soir avec papa et Pierrette ? Réponds !

MADAME CHANEL, . — Oui. Plus d'une heure...

SUZON. — Tu as gagné ?... Perdu ?...

MADAME CHANEL. — Perdu. Bien sûr !

SUZON. — Perdu combien ?... Car je suppose que vous ne jouez pas pour rien ! Combien ?

PIERRETTE. — ...300.000 balles !

SUZON — Tu as payé ?

MADAME CHANEL. — Non... J'ai emprunté.

SUZON. — A qui ?

MADAME CHANEL. — A Monsieur... (Sensation générale.) Je l'ai quitté vivant ! Jamais je n'aurais pu faire cette horreur ! Je suis sortie, en laissant Monsieur et Pierrette continuer la partie. Je le jure!

SUZON. — Pierrette, vous êtes donc restée seule avec mon père ? Qu'avez-vous fait?

PIERRETTE. — Rien. On a bavardé...

MADAME CHANEL, éclatant de rage. — C'est pas vrai ! Vous avez ri! Je vous ai entendus. Vous avez ri de moi Vous avez ri parce que vous aviez triché tous les deux. Vous avez ri parce que vous m'aviez volé 300.000 francs!

PIERRETTE, se dresse livide. — Et hop là ! Vous venez de vous trahir ! Le doute n'est plus possible. C'est vous qui avez tué Marcel...

MADAME CHANEL. — J'ai ma conscience pour moi... Je ne me suis pas retirée en province pour me garer d'une mauvaise affaire..., moi !

(Elles s'affrontent du reggard.)

SUZON. — Chanel, tu les as entendus rire ? Alors ? Qu'as-tu fait ?

MADAME CHANEL — Rien. J'ai pleuré. (Elle cache son visage.) Qu'on me laisse tranquille à présent! Je n'ai plus rien à dire.

(Elle monte l’escalier et disparaît en pleurant.)


Date: 2015-12-18; view: 329


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