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Des investissements massifs outre-mer

 

En 1914, le Royaume-Uni figure largement au premier rang des exportateurs mondiaux de capitaux avec 42% du total mondial contre 20% à la France, 13% à l’Allemagne et 8% aux Etats-Unis (J.P. Dormois, 2008 d’après A. Feis, 1930). Entre 1890 et 1914, ils ont engagé, par l’intermédiaire de leurs banques, environ 4 milliards de livres dans les pays d’Outre-mer. Selon Davis et Huttenback, les flux annuels d’investissement se montaient à 40 millions dans les années 1860, mais à 175 entre 1910 et 1914, soit l’équivalent de la moitié des investissements dans l’économie nationale.

 

Les investisseurs britanniques privilégient l’Empire et le continent américain, abandonnant l’Europe et le Proche-Orient aux Français et Allemands :

 

Tableau 7 – Répartition géographique des investissements extérieurs du Royaume-Uni en 1914 (en % du total des investissements

 

Europe   5,25  
Amérique du Nord, dont -Etats-Unis -Canada   21,00 14,00 35,25  
   
   
Amérique latine, dont :   7,77 18,50  
  -Argentine  
Australie et Nouvelle-Zélande   11,00  
Inde et Ceylan   9,25  
Afrique du Sud et Rhodésie   3,25  
Total

Source : Crouzet (1978), Mathias (1983).

 

 

Dans l’Empire, ce sont les dominons de peuplement blanc qui constituent les principaux bénéficiaires : Canada, Australie et Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud. Toutefois, les immobilisations de capitaux britanniques aux Etats-Unis dépassent celles effectuées au Canada. En Amérique du Sud, les Britanniques ont investi dans tous les pays. Mais la Grande-Bretagne préfère toujours investir en emprunts publics ou bénéficiant d’une garantie gouvernementale plus ou moins totale : prêts gouvernementaux, actions et obligations de chemin de fer et de services publics représentent 75% des avoirs britanniques, soit 2,85 milliards de livres.

 

Différents facteurs ont été mis en avant pour expliquer ces exportations de capitaux. Pour les marxistes (John A. Hobson), la baisse tendancielle des taux de profit à l’intérieur du pays rend les investissements extérieurs de plus en plus attractifs. En même temps, l’inégalité grandissante entre riches et pauvres dans les pays industrialisés les contraints, pour faire face à la surproduction, à rechercher de nouveaux débouchés, d’où la conquête coloniale qui favorise l’investissement des capitaux excédentaires. L’on ne peut démontrer la réalité des taux de profit, en revanche, il est certain que « les investissements outre-mer offraient aux détenteurs de capitaux des rendements supérieurs… » (Edelstein, 1976). Ces investissements outre-mer proposent à la fois de meilleurs rendements (4,5% à 5% par an en moyenne) et des risques limités. Enfin, il existe un marché très actif de titres payables au porteur permettant aux détenteurs de se débarrasser rapidement titres s’ils le souhaitent. Selon Davis et Huttenback, in Mammon and the Pursuit of Empire, il faut prendre aussi en compte le coût, pour la puissance publique et le contribuable britannique, de la sécurité de ces investissements. Pour ces auteurs, les coûts engagés pour acquérir et maintenir l’Empire dans le giron britannique auraient dépassé les bénéfices retirés par le citoyen britannique, à l’exception des capitalistes pour qui empire « formel » (Commonwealth) et empire « informel » (Amérique du Sud par exemple) auraient constitué un gisement de profits. Mais une telle thèse attend d’être démontrée.



 

L’exportation massive de capitaux a un d’abord apporté un flux de revenus importants : environ 6,5% du PNB en moyenne par an de 1991 à 1913, dont il est difficile de connaître la destination exacte. Ces investissements à l’étranger ont eu pour effet d’améliorer les capacités de production, de réduire les coûts et de diversifier la production de l’industrie britannique. Certes la Grande-Bretagne a eu tendance à importer davantage de ses débiteurs, mais aussi à exporter plus au profit des pays neufs en voie d’équipement. En revanche, la concurrence apportée par ce pays à l’agriculture et à l’industrie textile anglaise a précipité l’émigration : de 1860 à 1913, le nombre total net retours déduits des sorties atteignit 6,964 millions de personnes, dont 2,324 pendant les seules années 1900-1913 (Crouzet, 1978). Enfin, il existe un débat autour des effets des exportations de capitaux sur le marché financier londonien. Pour William Kennedy, les investisseurs britanniques ont eu une préférence marquée pour les secteurs offrant les plus grandes garanties de sécurité (BTP, chemins de fer, équipements d’infrastructures à l’utilité sociale). A partir de 1902, aurait joué un effet d’éviction : ces secteurs redevenus profitables en Grande-Bretagne, n’auraient pu bénéficier de capitaux, parce que ceux-ci auraient été détourné vers l’étranger ou l’Empire, avec, à long terme, des conséquences négatives sur les infrastructures britanniques. Ce point de vue est contesté par Roderick Floud (1995) et Charles Feinstein (1982) : non seulement la demande en capitaux de la part des chefs d’entreprises britanniques était négligeable, mais les investissements outre-mer ont maintenu des taux de rentabilité élevés et favorisé la propension à l’épargne.

 


Date: 2015-12-11; view: 751


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