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TABLE DES SÉANCES 44 page

…de l'objet maternel, et que s'il ne peut pas frapper celui qui est désigné à sa vindicte, c'est dans

la mesure où lui-même, en somme, aurait déjà commis

le crime qu'il s'agit de venger.

 

C'est pour autant, nous dit-on,

que dans l'arrière-plan, il y a le souvenir :

 

- du désir infantile pour la mère,

- du désir œdipien du meurtre du père,

 

…c'est dans cette mesure qu'HAMLET se trouve

en quelque sorte complice de l'actuel possédant,

que ce possédant est à ses yeux un beatus possidens,

qu'il en est complice, qu'il ne peut donc s'attaquer à ce possesseur sans s'attaquer lui-même.

 

Mais est-ce cela qu'on veut dire, ou bien qu'il ne peut s'attaquer à ce possesseur sans réveiller en lui le désir ancien, c'est-à-dire un désir ressenti comme coupable, mécanisme qui tout de même est plus sensible.

 

Mais après tout, est-ce que tout cela ne permet pas…

fascinés devant une sorte d'insondable lié à un schéma qui pour nous est environné d'une sorte

de caractère intouchable, non dialectique

…que nous puissions dire que tout ceci en somme

se renverse ?

 

Je veux dire qu'on pourrait aussi bien…

si HAMLET se précipitait

tout de suite sur son beau-père

…dire qu'il y trouve, après tout, l'occasion d'étancher sa propre culpabilité en trouvant

hors de lui le véritable coupable.

 

Que tout de même…

pour appeler les choses par leur nom

…tout le porte à agir, au contraire, et va dans

le même sens, car le père revient de l'au-delà

sous la forme d'un fantôme pour lui commander

cet acte de vindicte, cela ne fait aucun doute.

 

Le commandement du surmoi est là en quelque sorte matérialisé et pourvu de tout le caractère sacré

de celui-là même qui revient d'outre-tombe, avec ce que lui ajouta d'autorité de grandeur, de séduction,

le fait d'être la victime :

le fait d'avoir été vraiment atrocement dépossédé

non seulement :

- de l'objet de son amour,

- mais de sa puissance, de son trône,

- de la vie même,

- de son salut, de son bonheur éternel.

 

Il y a cela, et en plus viendrait jouer

dans le même sens quelque chose qu'on pourrait appeler dans l'occasion « le désir naturel d'HAMLET ».

 

Si en effet c'est quelque chose qu'il n'a pas pu ressentir encore, qu'il est séparé de cette mère, qu'incontestablement, le moins qu'on puisse dire, compte pour lui qu'il soit fixé à sa mère,

c'est la chose la plus certaine et la plus apparente du rôle d'HAMLET.

Donc ce désir, que j'appelle à cette occasion « naturel », et non sans intention, car à l'heure où JONES écrit son article sur HAMLET, il en est encore à devoir plaider devant le public cette dimension du refoulement et de la censure, et toutes les pages qu'il écrit à cette occasion tendent à donner



à cette censure une origine sociale.

 

« Il est tout de même curieux - curiously enough, dit-il - que les choses qui évidemment sont les plus censurées par l'organisation sociale, ce soient les désirs les plus naturels. » [74]

 

En vérité cela pose en effet une question.

Pourquoi après tout la société ne s'est-elle pas organisée pour la satisfaction de ces désirs les plus naturels, si c'est vraiment de la société que surgit la dimension du refoulement et de la censure.

 

Ceci pourrait peut-être nous conduire un peu plus loin, à savoir que c'est quelque chose de tout à fait sensible que les choses dont on n'a jamais l'air

de s'apercevoir, les nécessités de la vie, de la vie du groupe, les nécessités sociologiques ne sont pas du tout exhaustives pour expliquer cette sorte d'interdit d'où surgit, chez les êtres humains,

la dimension de l'inconscient.

 

Cela suffit si peu qu'il a fallu que FREUD invente

un mythe originel…

pré-social, ne l'oublions pas puisque

c'est lui qui fonde la société

…à savoir Totem et Tabou, pour expliquer les principes mêmes du refoulement.

 

Et le commentaire de JONES à la date à laquelle

il la fait et où curieusement, malheureusement,

il la conserve, cette genèse sociologique des interdits

au niveau de l'inconscient, très exactement à savoir de la censure, très exactement de la source de l'œdipe, est une erreur de la part de JONES.

C'est une erreur peut-être assez délibérée, apologétique, l'erreur de quelqu'un qui veut convaincre, qui veut conquérir un certain public de psycho-sociologues,

ce n'est pas du tout quelque chose qui ne soit pas sans poser un problème.

 

Mais revenons à notre HAMLET.

Nous le voyons en fin de compte avec deux tendances :

 

- la tendance impérative qui est pour lui doublement commandée par l'autorité du père et l'amour qu'il lui porte,

 

- et la deuxième de vouloir défendre sa mère et de se la garder,

 

…qui doivent le faire aller dans le même sens pour tuer CLAUDIUS.

 

Donc deux choses positives - chose curieuse - donneraient un résultat zéro.

Je sais bien que cela arrive.

J'avais trouvé un très joli exemple à un moment

où je venais de me casser la jambe :

un raccourcissement plus un autre raccourcissement - celui de l'autre jambe - et il n'y a plus de raccourcissement !

 

C'est un très bon exercice pour nous, car nous avons affaire à des choses de cet ordre.

 

Est-ce que c'est de cela qu'il s'agit ?

Non, je ne le crois pas.

Je crois plutôt que nous nous engageons dans une dialectique illusoire, que nous nous satisfaisons de quelque chose qui, après tout, ne se justifie sans doute pas, à savoir qu'HAMLET est là, qu'il faut bien l'expliquer.

 

Que nous touchons quand même quelque chose d'essentiel,

à savoir qu'il y a un rapport qui rend cet acte difficile, qui rend la tâche répugnante pour HAMLET, qui le met effectivement dans un caractère problématique vis à vis de sa propre action, et que ce soit son désir, qu'en quelque sorte ce soit le caractère impur de son désir qui joue le rôle essentiel, mais à l'insu d'HAMLET.

Qu'en quelque sorte, c'est pour autant que son action n'est pas désintéressée, qu'elle est anciennement motivée, qu'HAMLET ne peut pas accomplir son acte,

je crois qu'en gros c'est là quelque chose en effet

que nous pouvons dire, mais qui est, à la vérité, alors presque accessible avant l'investigation psychanalytique, et dont nous avons les traces : c'est l'intérêt de la bibliographie de JONES de le montrer.

 

Certains…

bien avant que FREUD ait commencé à articuler [l'Œdipe], dans des écrits de 1880 ou 1890

…certains auteurs l'ont entrevu.

 

Néanmoins, je crois que nous pouvons analytiquement formuler quelque chose de plus juste et aller plus loin que ce à quoi - je crois - se réduit ce qui

a été formulé analytiquement sur ce plan.

 

Et je crois que pour le faire, nous n'avons

qu'à suivre vraiment le texte de la pièce

et à nous apercevoir de ce qui va suivre.

 

Ce qui va suivre consiste à vous faire remarquer

que ce à quoi HAMLET a affaire…

et tout le temps, ce avec quoi HAMLET se collete …c'est un désir qui doit être regardé, considéré

là où il est dans la pièce, c'est-à-dire

très différent, bien loin du sien

…que c'est le désir non pas pour sa mère,

mais le désir de sa mère.

 

Il ne s'agit vraiment que de cela.

 

Le point pivot, celui sur lequel il faudrait qu'avec vous je lise toute la scène, c'est celui de

la rencontre avec sa mère après la play scene, la scène

de la pièce qu'il a fait jouer et avec laquelle

il a surpris la conscience du roi, et où tout le monde est de plus en plus angoissé à propos de ses intentions à lui, HAMLET :

on décide de le faire appeler, d'avoir un entretien avec sa mère.

 

Lui-même, HAMLET, c'est tout ce qu'il désire.

À cette occasion il va, dit-il, retourner le fer

dans la plaie, il parle de « dague »[75] dans le cœur de sa mère.

 

Et se passe cette longue scène qui est une espèce de sommet du théâtre, ce quelque chose à propos de quoi, la dernière fois, je vous disais que cette lecture est à la limite du supportable, où il va adjurer pathétiquement sa mère de prendre conscience du point où elle en est…

je regrette de ne pas pouvoir lire

toute cette scène, mais faites-le et comme

on le fait à l'école, la plume à la main

…il lui explique :

 

- à quoi est-ce que cela ressemble, cette vie !

- Et puis tu n'es pas de la toute première jeunesse quand même, cela doit un peu se calmer chez toi!

 

Ce sont des choses de cet ordre-là qu'il lui dit dans cette langue admirable. Ce sont des choses qu'on ne croit pas pouvoir entendre d'une façon qui soit plus pénétrante et qui réponde mieux à ce qu'en effet HAMLET est parti comme un dard pour le dire à sa mère, à savoir des choses qui sont destinées à lui ouvrir le cœur, et qu'elle ressent comme telles.

C'est-à-dire qu'elle-même lui dit : « Tu m'ouvres le cœur… »[76]

 

Elle gémit littéralement sous la pression.

 

On est à peu près certain qu'HAMLET a trente ans.

Cela peut se discuter, mais on peut dire qu'il y a dans la scène du cimetière une indication, quelque chose dont on peut déduire qu'HAMLET en a un tout petit peu moins, la mère en a au moins quarante cinq.

si HAMLET en a un tout petit peu moins, il est bien clair que comme il se souvient du pauvre YORICK [V,1]

qui est mort il y a une trentaine d'années et qui l'a embrassé sur les lèvres, on peut dire qu'il a trente ans. C'est important de savoir qu'HAMLET n'est pas

un petit jeune homme.

Après il compare son père à HYPÉRION, celui sur qui

« les dieux ont marqué tous leurs sceaux. »[77]. Et à côté, voilà cette espèce de déchet, roi de haillons et de chiffes perdus,

une ordure, un faisan, un maquereau, cet autre, et c'est avec cela que vous vous roulez dans l'ordure !

 

Il ne s'agit que de cela, et il y a lieu de l'articuler, vous verrez plus loin ce dont il s'agit, mais quoi qu'il en soit, il s'agit du désir de la mère, d'une adjuration d'HAMLET qui est une demande du style : « reprenez cette voie, dominez-vous, prenez, vous disais-je la dernière fois, la voie des bonnes mœurs, commencez par ne plus coucher avec mon oncle ».[78]

 

Les choses sont dites comme cela.

Et puis chacun sait, dit-il, que l'appétit vient

en mangeant, que ce démon, l'habitude, qui nous lie aux choses les plus mauvaises, s'exerce aussi dans

le sens contraire, à savoir en apprenant à vous tenir mieux, cela vous sera de plus en plus facile.

 

Nous voyons quoi ? L'articulation d'une demande qui est faite par HAMLET manifestement au nom de quelque chose qui est de l'ordre, pas simplement de la loi, mais de la dignité, et qui est menée avec une force, une vigueur, une cruauté même, dont le moins qu'on puisse dire

est que cela déclenche plutôt la gêne.

 

Puis arrivé là, alors que l'autre est littéralement pantelante, au point qu'on a pu se demander

si l'apparition qui se produit alors du spectre…

car vous savez que le spectre réapparaît

dans la scène de la chambre à coucher

…n'est pas quelque chose qui consiste à dire à HAMLET « Taïaut, taïaut ! Vas-y, continue ! » Mais aussi, jusqu'à un certain point à le rappeler à l'ordre de protéger sa mère contre je-ne-sais-quoi qui serait une espèce de débordement agressif qui est celui devant quoi

la mère elle-même à un moment a tremblé :

 

« Est-ce que tu veux me tuer ? Jusqu'où vas-tu aller ? » [ What wilt thou do? Thou wilt not murther me ? ]

l'Autre, si le discours du sujet qui est celui qui

se poursuit pour autant qu'au­delà de cette première étape, de ce premier rapport à l'Autre, ce qu'il s'agit pour lui de trouver dans ce discours qui

le modèle, qui le structure, dans ce discours déjà structuré, c'est de retrouver à l'intérieur de cela ce qu'il veut vraiment.

 

Car c'est la première étape et l'étape fondamentale de tout repérage du sujet par rapport à ce qu'on appelle son will, sa propre volonté.

 

Sa propre volonté, c'est d'abord cette chose…

nous le savons nous autres analystes

…la plus problématique, à savoir ce qu'il désire vraiment.

 

Car il est tout à fait clair qu'au-delà des nécessités de la demande, pour autant qu'elle morcelle et fracture ce sujet, la retrouvaille du désir dans son caractère ingénu est quelque chose qui est le problème auquel nous avons constamment affaire.

 

L'analyse nous dit qu'au delà de ce rapport

à l'Autre, cette interrogation du sujet sur ce qu'il veut n'est pas simplement celle du crochet interrogatif qui est ici dessiné dans le second plan du graphe :

 

 

Mais qu'il y a là-dessus quelque chose pour se retrouver, à savoir que, comme dans le premier étage :

- il y a quelque part installée une chaîne signifiante qui s'appelle à proprement parler l'inconscient et qui donne déjà à cela son support signifiant, qu'on peut s'y retrouver quelque part,

- il y a là inscrit un code qui est le rapport du sujet à sa propre demande.

- Il y a déjà un registre qui est instauré, grâce à quoi le sujet peut percevoir quoi ?

 

Non pas comme on le dit que sa demande est orale,

ou anale, ou ceci ou cela, car ce n'est pas de cela qu'il s'agit : qu'il est dans un certain rapport privilégié en tant que sujet. Et c'est pour cela

que j'ai inscrit ainsi, avec une certaine forme de demande, cette ligne au-delà de l'Autre où se pose l'interrogation du sujet. C'est une ligne consciente.

 

Avant qu'il y ait eu une analyse et des analystes, les êtres humains se sont posés la question…

et se la posaient sans cesse, croyez-le bien, comme de notre temps, comme depuis FREUD

…de savoir où était leur véritable volonté.

 

C'est pour cela que cette ligne nous la traçons d'un trait plein. Elle appartient au système de la personnalité, appelez la consciente ou préconsciente, pour l'instant je ne vais pas entrer dans plus de détails.

 

Mais qu'est-ce que nous indique ici le graphe ?

 

C'est que c'est évidemment sur cette ligne que quelque part va se situer le X qu'est le désir.

Que ce désir a un rapport avec quelque chose qui doit se situer sur la ligne de retour, en face de cette ligne intentionnelle. C'est en cela qu'il est l'homologue du rapport du moi [m ] avec l'image [ i(a) ].

 

Le graphe nous apprend que ce désir qui, flottant là, quelque part, mais toujours dans cet au-delà de l'Autre, ce désir est soumis à une certaine régulation, à une certaine hauteur, si l'on peut dire, de fixation qui est déterminée.

 

Déterminée par quoi ?

 

Par quelque chose qui se dessine ainsi :

 

 

À savoir d'une voie de retour du code de l'inconscient [S àD]

vers le message de l'inconscient sur le plan imaginaire.

 

Que le circuit pointillé, autrement dit inconscient, qui commence ici [1] et qui passant, au niveau du message S(A) [2], va au niveau du code de l'inconscient S àD [3],

en face de la demande, revient vers le désir (d)[4],

de là vers le fantasme S àa [5].

 

Que c'est, en d'autres termes, essentiellement par rapport à ce qui règle sur cette ligne, la hauteur, la situation du désir, et dans une voie qui est une voie de retour par rapport à l'inconscient…

car si vous remarquez comment est fait le graphe, vous verrez que le trait n'a pas de retour

…c'est dans ce sens que se produit le circuit de la formation du désir au niveau de l'inconscient.

Qu'est-ce que nous pouvons articuler à ce propos même, et à nous en tenir à cette scène d'HAMLET

en face de sa mère ?

C'est essentiellement ceci :

qu'il n'y a pas de moment où…

d'une façon plus complète et de façon

justement à plus annuler le sujet

…la formule de ceci :

que « le désir de l'homme est le désir de l'Autre », ne soit plus sensible, manifeste, accomplie.

 

En d'autres termes, ce dont il s'agit c'est que dans la mesure où c'est à l'Autre que le sujet s'adresse, non pas avec sa propre volonté, mais avec celle dont

il est à ce moment-là le support et le représentant, à savoir :

 

- celle du père,

- et aussi bien celle de l'ordre,

- et aussi bien celle de la pudeur, de la décence…

je reviendrai sur ces termes, ils ne sont pas là donnés pour le chic, j'ai déjà fait intervenir le démon de la pudeur et vous verrez quelle place il tiendra dans la suite

 

…et que c'est pour autant qu'il tient devant la mère ce discours au-delà d'elle-même qu'il en retombe

au niveau strict de cet Autre devant laquelle

il ne peut que se courber.

 

Que tracé, si l'on peut dire, le mouvement de cette scène est à peu près celui-ci, qu'au-delà de l'Autre l'adjuration du sujet essaye de rejoindre au niveau du code, de la loi, et qu'il retombe…

non pas vers un point où quelque chose l'arrête, où il se rencontre lui-même avec son propre désir, il n'a plus de désir, OPHÉLIE a été rejetée, et nous verrons la prochaine fois quelle est la fonction d'OPHÉLIE là-dedans

…mais tout se passe, si vous voulez, pour schématiser, comme si cette voie de retour revenait purement

et simplement de l'articulation de l'Autre, comme s'il ne pouvait en recevoir d'autre message qu'ici

le signifié de l'Autre, à savoir la réponse de la mère :

« Je suis ce que je suis, avec moi il n'y a rien à faire, je suis une vraie génitale

au sens du premier volume de La Psychanalyse d'aujourd'hui

moi je ne connais pas le deuil ».

 

 

Le repas des funérailles sert le lendemain aux noces, « Économie, économie ! » la réflexion est d'HAMLET.

Pour elle, elle est simplement un con béant.

Quand l'un est parti, l'autre arrive,

c'est de cela qu'il s'agit.

 

Le drame d'HAMLET, l'articulation d'HAMLET,

si c'est le drame du désir c'est…

nous l'avons vu tout au long de cette scène

…le drame…

pourquoi ne pas le dire, c'est très curieux

qu'on se serve tout le temps de mots comme objet, mais que la première fois qu'on le rencontre,

on ne le reconnaisse pas du début jusqu'à la fin on ne parle que de cela

…c’est qu'il y a un objet digne et un objet indigne.

 

« Madame, un peu de propreté, je vous prie,

il y a tout de même une différence entre ce dieu et cette ordure ! »

 

C'est de cela qu'il s'agit, et personne n'a jamais parlé de relation d'objet à propos d'HAMLET.

On en reste confondu.

Il ne s'agit pourtant que de cela !

 

Le discours auquel j'ai fait allusion tout à l'heure concernant la véritable, ou le véritable génital,

est un discours cohérent, car vous pourrez y lire que la caractéristique du génital, c'est qu'il ait le deuil léger.

C'est écrit dans le premier volume de La Psychanalyse aujourd'hui.

C'est un merveilleux commentaire de la dialectique d'Hamlet.

 

Or on ne peut qu'être frappé de ceci…

je vais un peu vite parce qu'il faut que je vous donne un aperçu des horizons vers lesquels je tends

…que si c'est bien un problème de deuil dont il s'agit, voilà que nous voyons entrer par l'intermédiaire,

et lié au problème du deuil, le problème de l'objet, ce qui peut-être nous permettra de donner

une articulation de plus à ce qui nous est apporté dans Trauer und Melancholie [79].

 

C'est à savoir que si le deuil a lieu…

et on nous dit que c'est en raison

d'une introjection de l'objet perdu

…pour qu'il soit introjecté peut-être y a-t-il

une condition préalable, c'est à savoir qu'il soit constitué en tant qu'objet et que, dès lors,

la question de la constitution en tant qu'objet

n'est peut-être pas purement et simplement liée

à la conception, aux étapes co­instinctuelles

comme on nous les donne.

 

Mais il y a quelque chose qui d'ores et déjà nous donne l'indice que nous sommes là au cœur du problème. C'est ce quelque chose sur quoi j'ai terminé

la dernière séance, et sur quoi va se dérouler toute la suite de nos rencontres, c'est ceci :

c'est que le point clef, le point décisif à partir

de quoi HAMLET, si l'on peut dire, prend le mors aux dents.

 

Car en effet, on l'a très bien remarqué, après avoir longtemps lanterné, tout d'un coup HAMLET a mangé du tigre, il se lance dans une affaire qui se présente dans des conditions invraisemblables.

 

Il a à tuer son beau-père, on vient lui proposer

de soutenir pour ce beau-père une sorte de gageure

qui va consister à se battre au fleuret, sans doute avec un monsieur dont il sait que la moindre des choses pour lui c'est qu'à l'heure où cela se passe ce monsieur ne lui veut pas beaucoup de bien,

ce n'est ni plus ni moins que le frère d'OPHÉLIE

qui vient de mettre fin à ses jours, nettement dans un trouble où il n'est pas pour rien.

 

Il sait en tout cas que ce monsieur lui en veut.

Lui, HAMLET, aime beaucoup ce monsieur, il le lui dit, et nous y reviendrons, et pourtant c'est avec lui qu'il va croiser le fer pour le compte de la personne qu'il a en principe à massacrer.

 

Et à ce moment, il se révèle un vrai tueur, absolument sans précédent, il ne laisse même pas faire une touche à l'autre, c'est une véritable fuite en avant qui est là tout à fait manifeste.

Le point sur lequel HAMLET prend le mors aux dents, c'est celui sur lequel j'ai terminé avec mon petit plan du cimetière et de ces gens qui se collettent

au fond d'une tombe, ce qui est quand même une drôle de scène, entièrement du cru de SHAKESPEARE car dans les « pré-Hamlet » il n'y en a pas trace.

 

Qu'est-ce qui se passe et pourquoi HAMLET est-il allé se fourrer là ?

 

Parce qu'il n'a pas pu supporter de voir un autre que lui-même afficher, étaler justement un deuil débordant ?

 

Les mots que je vous dis, il faudrait les supporter chacun avec une lecture d'HAMLET, mais c'est assez long pour que je ne puisse pas le faire.

Il n'y a pas un seul de ces mots qui ne soit soutenu par quelque chose qui est en substance dans le texte.

 

Il le dit : « Je n'ai pas supporté qu'il fasse autant d'esbrouffe autour de son deuil. »[80]

 

Il l'explique après, pour s'excuser d'avoir été si violent. C'est-à-dire devant ce que LAERTE a fait,

de sauter dans la tombe pour étreindre sa sœur,

de sauter lui à sa suite pour étreindre OPHÉLIE.

Il faut dire qu'on se fait une curieuse idée de ce qui doit se passer à l'intérieur, je vous l'ai suggéré

la dernière fois avec mon petit tableau imaginaire.

 

C'est par la voie du deuil autrement dit, et du deuil assumé dans le même rapport narcissique qu'il y a entre le moi et l'image de l'autre [ i(a) ], c'est en fonction

de ce que lui représente tout d'un coup dans un autre ce rapport passionnel d'un sujet avec un objet

qui est au fond du tableau…

la présence de S qui met devant lui tout à coup

un support où cet objet qui, pour lui, est rejeté

à cause de la confusion des objets, de la mixtion des objets

…c'est dans la mesure où quelque chose là, tout à coup, l'accroche, que ce niveau peut tout d'un coup être rétabli qui de lui, pour un court instant,


Date: 2016-03-03; view: 459


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