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Les facteurs de la liaison facultative

P. Delattre

Studies in French and comparative phonetics. 1966

Les facteurs de la liaison facultative

Il y a environ huit ans nous avons fait paraître une étude générale sur la liaison. Le traitement des liaisons facultatives y était fort insuffisant, même du point de vue pratique. Il est temps que nous y revenions.

Dans cet article, nous présentions les principales liaisons « obligatoires » entre le déterminatif et le nom : les autres enfants ; entre le pronom personnel et le verbe, et inversement : ils ont, ont-ils, après les invariables monosyllabiques : en Espagne, très important, et les principales liaisons « interdites » : après un nom singulier : un jardin immense, un enfant arrive, après et : lui et elle et devant h aspiré : un (numéral), huit, onze etc. les huit haches. Les trois principales catégories de liaisons facultatives étaient : après les noms pluriels : des maisons immenses, après les verbes : il parlait encore, et après les invariables polysyllabiques : pendant un an. Du point de vue descriptif, la liaison consiste à prononcer la consonne finale muette d’un mot au début syllabique d’un mot suivant commençant orthographiquement par une voyelle : il vit à la campagne. Nous notons bien que la liaison ne s’applique qu’à une consonne finale qui serait muette dans le mot isolé, car c’est par là que ce phénomène est unique au français. Dans le cas d’une consonne qui serait prononcée dans le mot isolé, on dit qu’il y a » enchaînement » : il habite à la campagne, un net avantage.

Du point de vue historique, la liaison résulte généralement de la survivance de consonnes finales de l’ancien français. Les consonnes se sont conservées dans la liaison entre deux mots étroitement unis, à cause du haut degré de syllabation ouverte qui caractérisait la prononciation de la fin du Moyen Français dans la chaîne verbale, la consonne finale du premier mot était tellement unie (syllabiquement) à la finale voyelle initiale du mot suivant, et tellement séparée (syllabiquement) de la voyelle précédente, qu’elle n’a pas été ‘atteinte par l’amuïssement de la même consonne dans le mot isolé ou suivi de consonne : petit (pċti), petit garçon (pċtigarsÉĞ), mais petit enfant (pe ti tĊĞ fĊĞ)

 

Avec l’affaiblissement de l’accent d’intensité la phrase prenait l’aspect d’une chaîne de syllabes égales – égales en intensité ‘comme en forme : consonne + voyelle - cachant les limites des mots et faisant le même sort aux consonnes finales de mot qu’aux consonnes intérieures de mot (chute devant consonne, préservation devant voyelle).



Les liaisons dites « facultatives » sont celles que l’on peut aussi bien faire qu’omettre sans pour cela dépasser les bornes du langage accepté. Pour l’étranger qui cherche à perfectionner son français, la difficulté « obligatoires « ou « interdites« car elle comporte un choix. Il est tout aussi correct de dire, Vous ave(z) entendu que Vous avez zentendu, mais encore faut-il savoir dans quelle circonstances dire l’un et non l’autre. La première forme serait déplacée en présence, ou dans la bouche de tel personnage respectable, la seconde serait ridicule, ou hautaine, entre de bonnes connaissances dans la vie de tous les jours. L’art de faire ou d’omettre la liaison facultative permet de garder ses distances devant les familiarités d’un tel, ou au contraire de briser la glace et de se faire rapidement un ami. La difficulté est augmentée, pour l’étranger, par le fait que dans les innombrables liaisons facultatives, certaines se font plus fréquemment que d’autres. Dans Vous avez entendu, on lit environ la moitié du temps, mais dans C’est un vieux bouquin, la liaison se fait presque toujours, sans pour cela être absolument obligatoire, et dans Un repos indispensable, elle ne se fait presque jamais, sans pour cela être absolument interdite. Il existe donc toute une hiérarchie dans la fréquence des liaisons facultatives. Les anecdotes, empruntées à Nyrop dépeignent les ennuis qu’éprouvent même les Français à ajuster leurs liaisons au moment et au milieu, « Un jour, dans une pièce de Madame de Girardin, « La joie fait peur », la jeune actrice chargée du rôle de l’ingénue dit, en parlant de fleurs qu’elle avait plantées avec son frère : nous les avions plantées zensemble, en faisant sentir l’s. Mme Girardin bondit sur sa chaise. Pas d’s ! Pas d’s ! s’écria-t-elle. Planté ensemble. Vous n’avez pas le droit de faire de pareilles liaisons à votre âge. Je me moque de la grammaire, Le n’y a qu’une règle pour les ingénues, c’est d’être ingénues. Cet affreux « s » vous vieillirait de disc ans ». Et dans le même esprit. « Chiffon, la jeune espiègle d’un roman de Gyp dit, en partant de ses cousines trop bien élevées, elles me parlaient comme on m’a pourtant appris à parler . . . et je ne les comprenais pas…..elles faisaient des liaisons! Et y a rien qui me trouble comme ça ! … c’est si drôle… il me semble que, on joue la comédie . . « .


Date: 2016-01-14; view: 909


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