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NOËL 1914. TRÊVE DE TRANCHÉES

Savions-nous que des soldats allemands, français et anglais trinquaient ensemble dans les tranchées de 1914 ? Un film de Christian Carion, Joyeux Noël, et l'ouvrage d'un collectif d'historiens, Frères d’armes, éclairent un moment étonnant de fraternisation.

0n nous a appris tant d’horreurs sur la Grande Guerre. L’enfer des tranchées. Le soldat chair à canon. La haine inextinguible entre les peuples. Une gigantesque boucherie qui a occulté les brefs moments d’humanité qui ont pu la ponctuer. Le soir de Noël 1914, comme le raconte le film de Christian Carion, on s’est serré la main entre ennemis plutôt que de serrer son fusil. Les chorales remplacent les balles. Chacun y va de ses cadeaux. Les Allemands font rouler les tonneaux de bière, distribuent les cigares, étrennes du Kaiser. Les Français se chargent du vin. Les Anglais apportent whisky et pudding. Grande foire au village sur le no man’s land ! On se découvre entre voisins de tranchées. Jusque-là, on s’entendait parler, tousser, rigoler. Mais là, l’ennemi a un visage. Stupéfaction. - Ils n ’ont pas une aussi sale bobine que j’aurais cru. » » Ils ont des figures comme nous. » Les soldats ont souvent rapporté l’événement dans leurs lettres. Nos manuels d’histoire ont enterré la scène qui faisait désordre. Un ouvrage, Frères d’armes (Perrin), répare cet oubli. Et relie cette trêve à un phénomène plus vaste et diffus : la fraternisation entre soldats ennemis.

Mais revenons à ce 24 décembre 1914. Ce jour-là, le ciel est bleu, la neige brille au soleil et les tranchées, décorées de sapins, ont un air de Holiday on Ice. Après des semaines de pluie et de boue, la nature aussi joue l’apaisement. De chaque côté, les soldats vivent leur premier hiver et découvrent les mêmes épouvantables conditions. « Pauvres clochards, ils sont dans la même mouise que nous », écrit un poilu français. Début décembre, on s’interpelle déjà entre « pauvres bougres ». On fraternise entre gars de l’infanterie, pris au piège des tranchées. Une première dans l’histoire de la guerre. Certes, en Espagne, les troupes de Napoléon et de Wellington avaient joué aux cartes ou puisé l’eau aux mêmes puits. Idem en Crimée. Mais, en 1914, la guerre s’enterre et immobilise des ennemis proches à se toucher. » Il me semble que je vois des larmes en face dans les yeux de mes guetteurs », écrit un soldat à sa fiancée.

La trêve ne sera pas générale. Un appel lancé par le pape sera ignoré. Ni organisé ni contagieux, ce repos des balles vaudra surtout pour les 50 kilomètres tenus par les Britanniques. Les Français, dont le territoire est envahi, auront plus de mal à faire la paix avec les « Fritz ». La population insultera même les soldats anglais coupables de pactiser avec le « boche ». Un élément a joué en faveur d'un rapprochement germano-anglais. Avant la guerre, de nombreux réservistes allemands ont travaillé à Londres comme serveurs ou chefs de rang. Un « poilu boche » retrouve ainsi son ancien « barber » et se fait coiffer dans le no man’s land. Ces Allemands maîtrisent la langue de Shakespeare, ce qui aide à nouer des contacts. Ils connaissent aussi des chants anglais. La musique, on le sait, adoucit les mœurs.



Autre temps fort : l’enterrement des morts qui gisent entre les lignes. Les deux camps tiennent à rendre les honneurs. Des offices communs sont célébrés. On savoure aussi le calme, le silence, irréels. On parle peu de la guerre, sujet tabou. On improvise des matchs de foot. Seule la presse anglaise s’en fera l’écho, favorable du reste, photos de troufions à l’appui, ce qui entraînera l’interdiction des appareils dans les tranchées. La hiérarchie s’en tiendra à des rappels à l’ordre, préférant nier ces agissements. Il est vrai que le Code pénal de l’armée n’avait pas prévu ce cas de figure.

FRÈRES DE MISÈRE Cette trêve ne sera pourtant que la manifestation la plus spectaculaire d’un phénomène plus large qui voit l’agressivité se négocier à la baisse.

Pour apprivoiser l’ennemi, tous les moyens sont bons. Combat d’insultes. Compétition de tirs sur des bouteilles. Concours d’imitation de cris d’animaux. Dictés par le bon sens, des accords tacites s’instaurent.

On met les pouces lors des corvées d’eau et de chiottes4. Les travailleurs sur les parapets et les chevaux de frise sont épargnés. Parfois, on emprunte le maillet et les barbelés de l’autre. On s’avertit des horaires d’explosion des mines. Le principe est toujours le même : « Si on les embête pas, ils nous tirent par dessus car ils en ont assez comme nous. » De surcroît, ces frères de misère ont des ennemis communs. Le général Hiver et les généraux. Les artilleurs aussi qui marmitent5 et mettent de l’huile sur le feu. Quand on apprend que son artillerie va donner, on prévient l’ennemi. Lors d’une inspection, on canarde6 pour la forme.

Selon les historiens, cette sympathie n’aurait fait le lit ni du pacifisme ni des désertions de 1917. Il s’agirait surtout d’une logique de survie. D’une gestion au quotidien de l’horreur. D’une résistance à la propagande. Mais le temps, l’usure, les morts auront raison de cette résistance. Ainsi, Noël 1915 ne verra pas se renouveler le miracle de l’an 1914. Un miracle dont un poilu résuma l’absurdité : « J’étais là à serrer la main des hommes que j’avais essayé de tuer quelques heures auparavant.» François-Guillaume Lorrain, Le Point, 03/11/2005.

1. le Kaiser : l'empereur d'Allemagne. 2. la mouise : la misère. 3. un boche / un Fritz : un Allemand (très péjoratif). 4. la corvée de chiottes : le nettoyage des WC (grossier mais officiel). -5. marmiter : bombarder. 6. canarder : tirer.

1. À quelle occasion cet article a-t-il été écrit ?

2. Que s’est-il passé à Noël 1914 ? Résumez le déroulement des événements.

3. Comment ces événements s’expliquent-ils ?

4. Cette trêve est-elle un cas isolé ?

5. Décrivez la situation des soldats dans les tranchées.

VOCABULAIRE

6. Relevez tous les mots utilisés pour désigner les soldats.

7. Que signifient :

a. une gigantesque boucherie

b. les étrennes du Kaiser

c. mettre les pouces

8. Reformulez les énoncés suivants :

a. nos manuels d’histoire ont enterré la scène qui faisait désordre

b. seule la presse anglaise s'en fera l’écho

c. les artilleurs qui mettent de l'huile sur le feu

PRODUCTION ORALE

9. Connaissez-vous de tels exemples de fraternisation dans l’histoire de votre pays ?

10. Approuvez-vous l’attitude des soldats ?

11. Comprenez-vous l’attitude d’une partie de la population française (souvent des réfugiés) qui insulte les soldats coupables de pactiser avec l’ennemi ?

12. Pouvez-vous expliquer l’absence de tels épisodes dans les manuels scolaires ?

VOCABULAIRE D’HISTOIRE

 

1. Completez le texte avec les mots suivants :

Mojen Âge - Antiquité - période -transition- découverte

Le passage de la Préhistoire à l’.....est marqué par l'écriture. Le début du.....est généralement situé ou moment de la chute de Rome (476). L’.....de l’Amérique ðar C.Colomb mille ans plus tard (1492) sert de . .. entre le Moyen Âge et la Renaissance. Le IVII siècle est celui des Lumières. La Résolut a été intégrée à cette ... qu'elle vient conclure.

 


Date: 2016-01-05; view: 871


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