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Licenciés pour avoir « grapillé » des plateaux-repas entamés

Produits périmés, bons de réduc, le « vol » obsède les patrons

Par Marie Kostrz | Rue89 | 29/08/2011 | 18H34

Récupérer de la nourriture dans les poubelles des entreprises, est-ce du vol ? Oui, pour certains patrons qui licencient.

Piocher dans une poubelle remplie de victuailles périmées ou récupérer un bon de réduction abandonné par un client est un acte hautement risqué pour certains employés. Les licenciements motivés par ces accusations se sont succédés ces derniers mois en France. Dernier concerné : un Marseillais de 59 ans qui réapprovisionnait les rayons du Monoprix de la Cannebière depuis huit ans. Les six melons et deux salades qu'il a sauvés de la benne à ordure ont bien failli lui coûter son poste. Après l'avoir mis à pied et annoncé son licenciement, l'enseigne est revenue en juillet sur sa décision.

D'autres n'ont pas eu cette chance. Le 15 juillet, une salariée d'ED a été renvoyée pour faute grave. Sa direction affirme qu'elle a subtilisé des salades et poireaux défraîchis, ce qu'elle nie. Les Prud'hommes devront trancher.

Licenciés pour avoir « grapillé » des plateaux-repas entamés

Antoine Gillot, avocat des deux employés licenciés en juillet par le cabinet d'avocat parisien Gide-Loyrette-Nouel pour avoir volé de la nourriture, se dit choqué par ces comportements patronaux, en pleine crise économique :

« Ces cas sont emblématiques d'une période très difficile pour les plus démunis. Or, ce sont eux, les plus vulnérables, qui se retrouvent être les premiers affectés. »

Dans la lettre de licenciement, la DRH du cabinet assure avoir recueilli des témoignages qui révèlent que les deux salariés récupéraient, à l'issue des réunions d'avocats, des bouteilles de vin et des victuailles. Antoine Gillot précise lui qu'il s'agissait plus d'un « grappillage » des restes des plateaux-repas commandés par le cabinet :

« Mes clients ont demandé la permission aux avocats. Ils ont récupéré cette nourriture en toute transparence, après avoir appris qu'elle était destinée à être jetée. »

Il a saisi les Prud'hommes de Versailles pour licenciement abusif.

« On ne peut pas voler quelque chose qui n'a plus de propriétaire »

Est-ce qu'accaparer de la nourriture déjà jetée ou en passe de l'être est un acte qui peut être qualifié de vol ? Jérémie Nutkowicz, avocat spécialisé en droit prud'hommal, penche plutôt pour le non :

« Une fois jetée à la poubelle, la nourriture n'est plus la propriété de l'employeur même si la poubelle lui appartient. Or on ne peut pas voler quelque chose qui n'a pas de propriétaire. »



Il précise cependant que l'employé doit respecter le règlement de l'entreprise. Monoprix interdit par exemple aux salariés de récupérer les produits jetés à la poubelle.

Pour Isabelle Ferreras, sociologue du travail à l'université de Louvain, ces licenciements montrent à quel point l'entreprise dispose intégralement de l'employé pendant ses heures de travail, au point de ne pas lui laisser posséder quoi que ce soit, même des déchets.

La chercheuse a ciblé son travail sur les caissières de supermarchés. Elle assure que ce phénomène est particulièrement frappant dans la grande distribution, où les rapports de domination entre employeurs et salariés sont poussés à l'extrême :

« L'entreprise a la hantise du vol du capital dont elle dispose. Ne pas laisser les salariés disposer de produits périmés est une manière d'affirmer sans ambiguïté cette norme absolue. »


Date: 2016-01-05; view: 1271


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