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Chapitre 4: L’île des Embruns

De l’hôtel Beau-Rivage, on a vue sur la mer, quand on se met debout sur le bord de la baignoire, et il faut faire attention de ne pas glisser. Quand il fait beau, et si on n’a pas glissé, on distingue très nettement la mystérieuse île des Embruns, où, d’après une brochure éditée par le Syndicat d’Initiative, le Masque de Fer a failli être emprisonné. On peut visiter le cachot qu’il aurait occupé, et acheter des souvenirs à la buvette.

 

C’est chic, parce qu’on va faire une excursion en bateau. M. et Mme Lanternau viennent avec nous, et ça, ça n’a pas tellement plu à papa qui n’aime pas beaucoup M. Lanternau, je crois. Et je ne comprends pas pourquoi. M. Lanternau, qui passe ses vacances dans le même hôtel que nous, est très drôle et il essaie toujours d’amuser les gens. Hier, il est venu dans la salle à manger avec un faux nez et une grosse moustache et il a dit au patron de l’hôtel que le poisson n’était pas frais. Moi, ça m’a fait drôlement rigoler. C’est quand maman a dit à Mme Lanternau que nous allions en excursion à l’île des Embruns, que M. Lanternau a dit: « Excellente idée, nous irons avec vous, comme ça, vous ne risquerez pas de vous ennuyer! » et après, papa a dit à maman que ce n’était pas malin ce qu’elle avait fait et que ce boute-en-train à la manque allait nous gâcher la promenade.

Nous sommes partis de l’hôtel le matin, avec un panier de pique-nique plein d’escalopes froides, de sandwiches, d’oeufs durs, de bananes et de cidre. C’était chouette. Et puis M. Lanternau est arrivé avec une casquette blanche de marin, moi j’en veux une comme ça, et il a dit: «Alors, l’équipage, prêt à l’embarquement? En avant, une deux, une deux, une deux! » Papa a dit des choses à voix basse et maman l’a regardé avec des gros yeux.

Au port, quand j’ai vu le bateau, j’ai été un peu déçu, parce qu’il était tout petit, le bateau. Il s’appelait « La Jeanne » et le patron avait une grosse tête rouge avec un béret dessus et il ne portait pas un uniforme avec des tas de galons en or, comme j’espérais, pour le raconter à l’école aux copains quand je rentrerai de vacances, mais ça ne fait rien, je le raconterai quand même, après tout, quoi, à la fin?

— Alors, capitaine, a dit M. Lanternau, tout est paré à bord?

— C’est bien vous les touristes pour l’île des Embruns? a demandé le patron et puis nous sommes montés sur son bateau. M. Lanternau est resté debout et il a crié :

— Larguez les amarres ! Hissez les voiles En avant, toute!

— Remuez pas comme ça, a dit papa, vous allez tous nous flanquer à l’eau!



— Oh oui, a dit maman, soyez prudent M. Lanternau. Et puis elle a ri un petit coup, elle m’a serré la main très fort et elle m’a dit de ne pas avoir peur mon chéri. Mais moi, comme je le raconterai à l’école à la rentrée, je n’ai jamais peur.

— Ne craignez rien, petite madame, a dit M. Lanternau à maman, c'est un vieux marin que vous avez à bord!

— Vous avez été marin, vous? a demandé papa.

— Non, a répondu M. Lanternau, mais chez moi, sur la cheminée, j’ai un petit voilier dans une bouteille ! Et il a fait un gros rire et il a donné une grande claque sur le dos de papa.

Le patron du bateau n’a pas hissé les voiles, comme l’avait demandé M. Lanternau, parce qu’il n’y avait pas de voiles sur le bateau. Il y avait un moteur qui faisait potpotpot et qui sentait comme l’autobus qui passe devant la maison, chez nous. Nous sommes sortis du port et il y avait des petites vagues et le bateau remuait, c’était chouette comme tout.

— La mer va être calme? a demandé papa au patron du bateau. Pas de grain à l’horizon?

M. Lanternau s’est mis à rigoler.

— Vous, il a dit à papa, vous avez peur d’avoir le mal de mer!

— Le mal de mer? a répondu papa. Vous voulez plaisanter. J’ai le pied marin, moi. Je vous parie que vous aurez le mal de mer avant moi, Lanternau!

— Tenu! a dit M. Lanternau et il a donné une grosse claque sur le dos de papa, et papa a fait une tête comme s’il voulait donner une claque sur la figure de M. Lanternau.

— C’est quoi, le mal de mer, maman? j’ai demandé.

— Parlons d’autre chose, mon chéri, si tu veux bien, m’a répondu maman.

Les vagues devenaient plus fortes et c’était de plus en plus chouette. De là où nous étions, on voyait l’hôtel qui avait l’air tout petit et j’ai reconnu la fenêtre qui donnait sur notre baignoire, parce que maman avait laissé son maillot rouge à sécher. Pour aller à l’île des Embruns, ça prend une heure, il paraît. C’est un drôle de voyage!

— Dites donc, a dit M. Lanternau à papa, je connais une histoire qui va vous amuser. Voilà: il y avait deux clochards qui avaient envie de manger des spaghetti...

Malheureusement je n’ai pas pu connaître la suite de l’histoire, parce que M. Lanternau a continué à la raconter à l’oreille de papa.

— Pas mal, a dit papa, et vous connaissez celle du médecin qui soigne un cas d’indigestion? et comme M. Lanternau ne la connaissait pas, papa la lui a racontée à l’oreille. Ils sont embêtants, à la fin! Maman, elle, n’écoutait pas, elle regardait, vers l’hôtel. Mme Lanternau, comme d’habitude, elle ne disait rien. Elle a toujours l’air un peu fatiguée.

Devant nous, il y avait l’île des Embruns, elle était encore loin et c’était joli à voir avec toute la mousse blanche des vagues. Mais M. Lanternau ne regardait pas l’île, il regardait papa, et, quelle drôle d’idée, il a tenu absolument à lui raconter ce qu’il avait mangé dans un restaurant avant de partir en vacances. Et papa, qui pourtant, d’habitude, n’aime pas faire la conversation avec M. Lanternau, lui a raconté tout ce qu’il avait mangé à son repas de première communion. Moi, ils commençaient à me donner faim avec leurs histoires. J’ai voulu demander à maman de me donner un oeuf dur, mais elle ne m’a pas entendu parce qu’elle avait les mains sur les oreilles, à cause du vent, sans doute.

— Vous m’avez l’air un peu pâle, a dit M. Lanternau à papa, ce qui vous ferait du bien, c’est un grand bol de graisse de mouton tiède.

— Oui, a dit papa, ce n’est pas mauvais avec des huîtres recouvertes de chocolat chaud.

L’île des Embruns était tout près maintenant.

— Nous allons bientôt débarquer, a dit M. Lanternau à papa, vous seriez chiche de manger une escalope froide ou un sandwich, tout de suite, avant de quitter le bateau?

— Mais certainement, a répondu papa, l’air du large, ça creuse! Et papa a pris le panier à pique-nique et puis il s’est retourné vers le patron du bateau.

— Un sandwich avant d’accoster, patron? a demandé papa.

Eh bien, on n’y est jamais arrivé à l’île des Embruns, parce que quand il a vu le sandwich, le patron du bateau est devenu très malade et il a fallu revenir au port le plus vite possible.

 

Chapitre 5: La gym

Un nouveau professeur de gymnastique a fait son apparition sur la plage, et tous les parents se sont empressés d’inscrire leurs enfants à son cours. Ils ont pensé, dans leur sagesse de parents, que d’occuper les enfants pendant une heure tous les jours pouvait faire le plus grand bien à tout le monde.

 

Hier, on a eu un nouveau professeur de gymnastique.

— Je m’appelle Hector Duval, il nous a dit, et vous?

— Nous pas, a répondu Fabrice, et ça, ça nous a fait drôlement rigoler.

J’étais sur la plage avec tous les copains de l’hôtel, Blaise, Fructueux, Mamert, qu’il est bête celui-là! Irénée, Fabrice et Côme. Pour la leçon de gymnastique, il y avait des tas d’autres types ; mais ils sont de l’hôtel de la Mer et de l’hôtel de la Plage et nous, ceux du Beau-Rivage, on ne les aime pas.

Le professeur, quand on a fini de rigoler, il a plié ses bras et ça a fait deux gros tas de muscles.

— Vous aimeriez avoir des biceps comme ça? a demandé le professeur.

— Bof, a répondu Irénée.

— Moi, je ne trouve pas ça joli, a dit Fructueux, mais Côme a dit qu’après tout, oui, pourquoi pas, il aimerait bien avoir des trucs comme ça sur les bras pour épater les copains à l’école. Côme, il m’énerve, il veut toujours se montrer. Le professeur a dit:

— Eh bien, si vous êtes sages et vous suivez bien les cours de gymnastique, à la rentrée, vous aurez tous des muscles comme ça.

Alors, le professeur nous a demandé de nous mettre en rang et Côme m’a dit:

— Chiche que tu ne sais pas faire des galipettes comme moi. Et il a fait une galipette.

Moi, ça m’a fait rigoler, parce que je suis terrible pour les galipettes, et je lui ai montré.

— Moi aussi je sais ! Moi aussi je sais ! a dit Fabrice, mais lui, il ne savait pas. Celui qui les faisait bien, c’était Fructueux, beaucoup mieux que Blaise, en tout cas. On était tous là, à faire des galipettes partout, quand on a entendu des gros coups de sifflet à roulette.

— Ce n’est pas bientôt fini? a crié le professeur. Je vous ai demandé de vous mettre en rang, vous aurez toute la journée pour faire les clowns!

On s’est mis en rang pour ne pas faire d’histoires et le professeur nous a dit qu’il allait nous montrer ce que nous devions faire pour avoir des tas de muscles partout. Il a levé les bras et puis il les a baissés, il les a levés et il les a baissés, il les a levés et un des types de l’hôtel de la Mer nous a dit que notre hôtel était moche.

— C’est pas vrai, a crié Irénée, il est rien chouette notre hôtel, c’est le vôtre qui est drôlement laid!

— Dans le nôtre, a dit un type de l’hôtel de la Plage, on a de la glace au chocolat tous les soirs

— Bah! a dit un de ceux de l’hôtel de la Mer, nous, on en a à midi aussi et jeudi il y avait des crêpes à la confiture!

— Mon papa, a dit Côme, il demande toujours des suppléments, et le patron de l’hôtel lui donne tout ce qu’il veut!

— Menteur, c’est pas vrai! a dit un type de l’hôtel de la Plage.

— Ça va continuer longtemps, votre petite conversation ? a crié le professeur de gymnastique, qui ne bougeait plus les bras parce qu’il les avait croisés. Ce qui bougeait drôlement, c’étaient ses trous de nez, mais je ne crois pas que c’est en faisant ça qu’on aura des muscles.

Le professeur s’est passé une main sur la figure et puis il nous a dit qu’on verrait plus tard pour les mouvements de bras, qu’on allait faire des jeux pour commencer. Il est chouette, le professeur

— Nous allons faire des courses, il a dit. Mettez-vous en rang, là. Vous partirez au coup de sifflet. Le premier arrivé au parasol, là-bas, c’est le vainqueur. Prêts? et le professeur a donné un coup de sifflet. Le seul qui est parti, c’est Mamert, parce que nous, on a regardé le coquillage que Fabrice avait trouvé sur la plage, et Côme nous a expliqué qu’il en avait trouvé un beaucoup plus grand l’autre jour et qu’il allait l’offrir à son papa pour qu’il s’en fasse un cendrier. Alors, le professeur a jeté son sifflet par terre et il a donné des tas de coups de pied dessus. La dernière fois que j’ai vu quelqu’un d’aussi fâché que ça, c’est à l’école, quand Agnan, qui est le premier de la classe et le chouchou de la maîtresse, a su qu’il était second à la composition d’arithmétique.

— Est-ce que vous allez vous décider à m’obéir ? a crié le professeur.

— Ben quoi, a dit Fabrice, on allait partir pour votre course, m’sieur, y a rien qui presse.

Le professeur a fermé les yeux et les poings, et puis il a levé ses trous de nez qui bougeaient, vers le ciel. Quand il a redescendu la tête, il s’est mis à parler très lentement et très doucement.

— Bon, il a dit, on recommence. Tous prêts pour le départ.

— Ah non, a crié Mamert, c’est pas juste ! C’est moi qui ai gagné, j’étais le premier au parasol! C’est pas juste et je le dirai à mon papa ! et il s’est mis à pleurer et à donner des coups de pied dans le sable et puis il a dit que puisque c’était comme ça, il s’en allait et il est parti en pleurant et je crois qu’il a bien fait de partir, parce que le professeur le regardait de la même façon que papa regardait le ragoût qu’on nous a servi hier soir pour le dîner.

— Mes enfants, a dit le professeur, mes chers petits, mes amis, celui qui ne fera pas ce que je lui dirai de faire... je lui flanque une fessée dont il se souviendra longtemps!

— Vous n’avez pas le droit, a dit quelqu’un, il n’y a que mon papa, ma maman, tonton et pépé qui ont le droit de me donner des fessées !

— Qui a dit ça? a demandé le professeur.

— C’est lui, a dit Fabrice en montrant un type de l’hôtel de la Plage, un tout petit type.

— C’est pas vrai, sale menteur, a dit le petit type et Fabrice lui a jeté du sable à la figure, mais le petit type lui a donné une drôle de claque. Moi je crois que le petit type avait déjà dû faire de la gymnastique et Fabrice a été tellement surpris, qu’il a oublié de pleurer. Alors, on a tous commencé à se battre, mais ceux de l’hôtel de la Mer et ceux de l’hôtel de la Plage, c’est des traîtres.

Quand on a fini de se battre, le professeur, qui était assis sur le sable, s’est levé et il a dit :

— Bien. Nous allons passer au jeu suivant. Tout le monde face à la mer. Au signal, vous allez tous à l’eau ! Prêts ? Partez !

Ça, ça nous plaisait bien, ce qu’il y a de mieux à la plage, avec le sable, c’est la mer. On a couru drôlement et l’eau était chouette et on s’est éclaboussés les uns les autres et on a joué à sauter avec les vagues et Côme criait:

« Regardez-moi! Regardez-moi! Je fais du crawl ! » et quand on s’est retournés, on a vu que le professeur n’était plus là.

Et aujourd’hui, on a eu un nouveau professeur de gymnastique.

— Je m’appelle Jules Martin, il nous a dit, et vous?

 

Les vacances se poursuivent agréablement, et le père de Nicolas n’a rien à reprocher à l’hôtel Beau-Rivage, si ce n’est son ragoût, surtout le soir où il a trouvé un coquillage dedans. Comme il n’y a plus de professeur de gymnastique pour l’instant, les enfants cherchent d’autres activités pour y déverser le trop-plein de leur énergie...

 


Date: 2015-12-24; view: 703


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