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II- Le développement d’infractions autonomes comme moyen de réprimer les actes préparatoires

 

 

Dans la plupart des cas, quand le législateur incrimine un comportement il le fait en fonction du résultat qui peut être provoqué. Ainsi, le résultat est considéré comme l’un des éléments constitutifs essentiels de l’infraction et si ce résultat n’est pas atteint, l’infraction n’est pas consommée. C’est ce que l’on appelle une infraction matérielle.

Cependant, dans d’autres hypothèses, moins nombreuses il est vrai, le législateur incrimine un comportement en raison du danger social qu’il représente.

 

En effet, dans un but de prévention, il n’hésite pas à incriminer de simples comportements dangereux sans tenir compte de leur résultat effectif.

C’est l’agissement lui-même qui constitue l’atteinte à l’ordre social.

Deux catégories d’infraction répondent à ce cas de figure : les infractions formelles (A) et les infractions obstacles (B).

 

Pour mieux comprendre notre démonstration, nous avons choisi de prendre pour chaque type d’infraction, un exemple concret faute de temps pour pouvoir tous les examiner.

 

A) Les infractions formelles

 

L’infraction formelle, dans laquelle on trouve souvent employé le terme d’attentat, est celle dans laquelle la loi incrimine un procédé sans s’inquiéter des suites.

L’infraction est donc consommée indépendamment du résultat qui peut intervenir. Le résultat ne fait donc pas partie des éléments constitutifs de l’infraction, comme il en fait partie dans l’infraction matérielle.

L’existence d’un résultat ne modifie donc plus la qualification de l’infraction.

De plus, il est impossible pour l’auteur de se désister, en effet, le renoncement sera ineffectif, cela n’empêchera en rien la réalisation de l’infraction.

 

Le législateur transforme souvent des actes de tentative, donc des infractions non consommées, en infractions consommées telles que les atteintes sexuelles, l’attentat à la sûreté de l’Etat, la corruption, la subordination de témoin, les provocations et l’empoisonnement qui ici nous servira d’exemple plus concret.

 

Les infractions formelles sont de plus en plus utilisées, elles sont à la mode car cela permet d’intervenir tôt dans le processus criminel.

 

Deux conceptions se dégagent quant à la répression de ces infractions.

 

En effet, on pourrait dire que dans le délit formel, l’ « attentat » comprend la tentative (1), c'est-à-dire que l’on ne prendra pas en compte les actes préparatoires, mais on peut aussi voir que la tentative d’attentat existe (2), et que dans ce cas les actes préparatoires peuvent entrer dans le champs de la répression pénale.



 

1) L’attentat comprend la tentative

 

Certains considèrent que la tentative ne se distingue pas de l’acte consommé dans une infraction formelle car elle est comprise avec lui dans la notion d’attentat.

 

Selon Ortolan « L’attentat n’est autre chose que tentative ; atteinte autre chose que tenter. »

 

Le commencement d’exécution est directement punissable sans qu’il soit besoin de vérifier qu’il constitue bien une tentative.

L’infraction est consommée par un acte qui ne constituerait qu’une tentative dans l’infraction matérielle. L’agissement est donc punissable et érigé en infraction indépendamment du résultat effectif.

Il s’agit d’une infraction de moyen, le moyen révélant l’intention. Selon Merle et Vitu, dans leur Traité de droit criminel, « La loi se borne à incriminer un procédé ».

 

Nous voyons donc bien ici que les actes préparatoires ne sont toujours pas pris en compte dans ces infractions, seule la tentative entre directement par le biais d’une infraction formelle dans le champ pénal sans avoir besoin de recourir à la notion de tentative de DPG.

 

Prenons l’exemple de l’empoisonnement, infraction formelle la plus connue.

L’article 221-5 CP énonce que l’empoisonnement est « le fait d’attenter à la vie d’autrui par l’emploi ou l’administration de substances de nature à entraîner la mort ».

Même si, en cas d’empoisonnement, la personne ne décède pas, le crime est constitué.

En effet, le crime est consommé dès que les substances mortifères ont été absorbées par la victime.

De même, l’acte qui au regard d’une infraction matérielle serait un désistement volontaire, n’est considéré dans les infractions formelles que comme un repentir actif sans incidence sur la validité de l’infraction.

 

La question qu’il faut se poser est à partir de quels actes pouvons-nous déterminer un commencement d’exécution c'est-à-dire que l’infraction est consommée et à partir de quels autres, sommes-nous certains d’être en présence d’une tentative d’une infraction formelle ?

Ce dilemme a été réglé par la Jp qui voit dans l’emploi une tentative et dans l’administration un acte susceptible de commencement d’exécution.

Donc la tentative serait bien comprise dans l’attentat.

Par conséquent, les actes préparatoires ne seraient pas pris en compte.

 

Mais selon une partie de la Jp

2) La tentative d’attentat existe

 

En effet, les infractions formelles ont pour seuil de consommation ce qui correspond au commencement d’exécution dans le processus complet de la matérialité par rapport au résultat redouté. Il en résulte que la tentative punissable ne peut qu’être situé avant c'est-à-dire sur les actes préparatoires.

 

Ce qui n’est qu’un acte préparatoire dans l’infraction matérielle est une tentative dans l’infraction formelle.

 

En effet, dans les infractions formelles, on n’a pas besoin de prouver la tentative car elle est inclue dans l’acte incriminé. Donc si on punit la tentative de la tentative, les actes préparatoires entrent dans le champ pénal.

 

Pour cette partie de la Jp, la tentative doit être réprimée quelque soit le type d’infraction y compris l’infraction formelle, même s’ils relèvent tout de même que dans cette hypothèse, la répression repose sur une tentative de tentative, notion qui n’existe pas dans le CP.

 

Si on reprend notre exemple, il apparâit que la tentative d’empoisonnement est punissable.

Par conséquent, elle réprime la phase préparatoire au cours de laquelle sont commis et réalisés des actes tels que l’achat de produits, la rencontre avec un tiers chargé d’administrer le poison, l’organisation d’un plan machiavélique… dans le but d’administrer une substance mortifère à une personne.

 

Au cours de cette phase, la personne aurait encore la possibilité de se désister car il s’agirait d’étapes préalables à l’administration. Tant que la victime n’a pas absorbé ce poison, le désistement reste possible.

 

On incrimine donc bien des actes préparatoires ici.

 

B) Les infractions-obstacle

 

Dans les infractions-obstacle, on cherche à incriminer un comportement dangereux dans le but de prévenir un résultat dommageable.

On érige un comportement en infraction pour faire obstacle à une infraction prévisible.

 

Le DP réprime donc des agissements qui ne constitueraient même pas des commencements d’exécution dans l’infraction matérielle mais seulement des actes préparatoires ou mieux encore la simple extériorisation de la résolution criminelle.

On incrimine donc la simple extériorisation de la volonté criminelle par un acte préparatoire, c’est pourquoi J.Pradel dit de ces infractions qu’elles sont « des ouvrages avancées de la répression ».

 

Ces infractions se rapprochent beaucoup des infractions formelles : elles se résument à la seule création d’un péril.

Mais elles s’en distinguent dans la mesure où elles ont un lien plus distendu avec le résultat légal de l’infraction matérielle correspondant. En effet, la réalisation de ce résultat est une simple éventualité tandis que dans l’infraction formelle le rapport de causalité est immédiat, comme exigé par la jurisprudence sur la tentative.

 

Les infractions-obstacle sont plus nombreuses que les infractions formelles.

Par exemple la conduite sous l’empire d’un état alcoolique (art L1 code de la route), l’abandon d’une arme dans un lieu public (art R641-1 CP), la divagation d’animaux dangereux (art R622-2 CP), les menaces (art 222-17 CP), la mise en danger délibérée de la vie d’autrui (art 121-3 CP), le complot contre l’autorité de l’Etat (art 412-2 CP), et l’association de malfaiteurs (art 450-1 CP) sur laquelle nous allons nous arrêter un peu plus longuement.

 

L’association de malfaiteurs qui se définit comme tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un ou plusieurs crimes ou d'un ou plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement.

Le délit d’association de malfaiteurs permet de réprimer même si l’infraction n’est pas consommée.

La répression se situe donc aux actes préparatoires.

 

Nous avons choisi cet exemple car c’est l’exemple le plus flagrant.

En effet, nous assistons depuis une vingtaine d’années à une extension considérable de la répression des actes préparatoires suite à l’élargissement de la qualification d’association de malfaiteurs punissable depuis la loi du 2 février 1981 qui vise à la préparation de tout crime dès lors que celle-ci n’est pas entièrement solitaire.

De plus, la loi du 15 mai 2001 élargie la notion d’association de malfaiteurs aux délits punis d’au moins cinq ans, avant cette date cette infraction ne concernait que les délits punis d’au moins dix ans.

 

La théorie de la tentative et l’association de malfaiteurs sont deux notions assez semblables dans le sens ou chacune permet de réprimer un acte avant que l’infraction ne soit réellement consommée.

Cependant, l’association de malfaiteurs est une infraction en elle-même, une infraction autonome, elle se consomme dès les actes préparatoires en vue de la commission d’une infraction.

Au départ, le législateur avait instauré la circonstance aggravante de bande organisée, ce qui a permis de réprimer un maximum de comportement face au développement de la criminalité organisée.

Cependant cette notion n’était efficace que lorsque la tentative de l’infraction était prouvée ou lorsque l’infraction était consommée mais lorsque le délinquant s’arrêtait aux actes préparatoires, il n’y avait aucune répression possible.

C’est pourquoi, le législateur a crée cette infraction autonome qu’est le délit d’association de malfaiteurs qui permet la répression dès les actes préparatoires et qui peut être aggravé par l’infraction en cause même si cette dernière est consommée.

 

On peut imaginer que toutes ces dérogations faites au principe de ne pas réprimer les actes préparatoires sont dues à la politique criminelle.

Mais le législateur face à des infractions spécifiques, à des dangers trop grands pour la société et à de nouveaux comportements se trouve dans l’obligation de réprimer de plus en plus tôt dans le processus criminel.

 


[1] J-C SOYER, Droit pénal et Procédure pénale, 19e édition, LGDJ, 2006.

 

[2] Cass Crim 2 décembre 1954 Dalloz 1955. 219.

[3] Cass Crim 25 octobre 1962 (Lacour et Benamar & Schieb) Dalloz 1963 p.221.

[4] Cass Crim 3 mai 1974 (Ramel) Bull Crim 157.

[5] Cass Crim 27 mai 1959 RSC 1959.842.


Date: 2015-12-24; view: 634


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