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Le dispositif et le contrat médiatique

Le contrat médiatique a été décrit dans mon ouvrage sur le discours d’information [2] et donc je me contenterai d’en rappeler les données essentielles. L’information médiatique est déterminée par un dispositif dont les caractéristiques sont les suivantes :

) une instance de production composite comprenant divers acteurs (journalistes, rédacteurs en chef, direction de l’organe d’information, etc.) ayant chacun des rôles bien déterminés, ce qui rend difficile l’attribution de la responsabilité des propos tenus. Cette instance se définit globalement à travers cinq types de rôles qui englobent tous les autres : de chercheur d’informations, ce qui la conduit à s’organiser pour aller aux sources de ces informations (réseau avec les Agences de presse, correspondants de terrain, envoyés spéciaux, relais d’indicateurs) ; de pourvoyeur d’informations, ce qui l’amène à sélectionner l’ensembles des informations recueillies en fonction d’un certain nombre de critères ; de transmetteur d’informations, ce qui la conduit à mettre en scène les informations sélectionnées en fonction d’un certain nombre de visées d’effet, et en jouant sur des manières de décrire et de raconter ; de commentateur de ces informations, ce qui l’amène à produire un discours explicatif tentant d’établir des relations de cause à effet entre les événements (ou les déclarations) rapportés ; enfin, de provocateur de débats destinés à confronter les points de vue de différents acteurs sociaux ;

) une instance de réception, elle aussi composite, mais sans détermination de rôles spécifiques, ce qui la rend on ne peut plus floue. Elle est difficile à saisir, ce qui n’empêche pas l’instance médiatique de tenter de la cerner à grands coups de sondages et enquêtes. Dès lors, l’instance-cible devient une construction imaginée à partir des résultats de ces sondages, mais surtout à partir d’hypothèses sur ce que sont les capacités de compréhension du public visé (cible intellective), ses intérêts et ses désirs (cible affective) [3].

Quant à la finalité de ce contrat, elle correspond à la double logique que l’on a définie plus haut : finalité symbolique de transmission d’informations au nom de valeurs démocratiques : finalité pragmatique de conquête du plus grand nombre de lecteurs, d’auditeurs, de téléspectateurs, puisque l’organe d’information est soumis à la concurrence et ne peut vivre qu’à la condition de vendre ou d’engranger des recettes publicitaires. La finalité éthique oblige l’instance de production à traiter l’information, à rapporter et commenter les événements de la façon la plus crédible possible : elle se trouve surdéterminée par un enjeu de crédibilité. La finalité commerciale oblige l’instance médiatique à traiter l’information de façon à capter le plus grand nombre de récepteurs possible : elle se trouve surdéterminée par un enjeu de captation [4].



Il convient cependant de ne pas confondre le dispositif socio-communicationnel avec l’acte de mise en scène du discours. Le dispositif fait partie des conditions contractuelles de production de l’acte langagier, avec les instructions qu’il donne au sujet, mais il n’en constitue pas la totalité. C’est pourquoi il convient de distinguer acte de communication (englobant) et acte d’énonciation (spécifiant), et donc situation de communication et situation d’énonciation [5]. Cette distinction n’empêche pas qu’il y ait un rapport de réciprocité non symétrique entre les deux. Si la situation de communication surdétermine en partie le sujet en lui imposant des instructions discursives, celui-ci dispose d’une certaine marge de liberté pour procéder à une mise en scène énonciative qui respecte ces instructions, mise en scène qui d’ailleurs peut avoir, à terme, une influence sur le contrat lui-même [6].

Ainsi seront distingués contrat de communication médiatique et contrat d’énonciation journalistique : le premier renvoie aux caractéristiques du dispositif impliquant une instance de production médiatique et une instance de réception-public, reliés par une visée d’information, qu’on appellera la « machine médiatique » ; le second correspond à la façon dont l’énonciateur journaliste met en scène le discours d’information à l’adresse d’un destinataire imposé en partie par le dispositif et en plus imaginé et construit par lui. Cette distinction nous permettra par la suite de mieux déterminer les responsabilités dans les dérives du discours médiatique.


Date: 2015-12-11; view: 574


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